Le Fond monétaire international (FMI) est l’une des institutions financières les plus importantes au monde. Celle-ci a pour but d’encourager la stabilité financière, d’assurer la gestion des crises monétaires et financières en fournissant, par exemple, des crédits aux pays qui connaissent des difficultés économiques.

Le FMI est dirigé par 189 Etats membres, auxquels il rend compte de son action, qui a parfois été vivement contestée lors de certaines crises financières.

 

L’évolution du rôle du FMI depuis sa création

L’institution prend naissance en juillet 1944 lors de la conférence de Bretton Woods. A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, le risque de voir les grandes économies mondiales subir les tribulations d’une crise semblable à celle des années 1930 incite les acteurs économiques mondiaux à proposer des solutions pour assurer la stabilité du système monétaire international.

Lors de cette conférence, le représentant américain Harry Dexter White proposa un modèle reposant sur 3 règles :

  • Chaque État doit définir sa monnaie par rapport à l’or ou au dollar américain, lui-même convertible à l’or, ce qui donna naissance, pour chaque monnaie, à une parité en or ou en dollar ;
  • La fluctuation des monnaies par rapport à leur parité officielle ne doit se faire que dans une marge de 1% ;
  • Tous les États sont chargés d’assurer cette parité en veillant à équilibrer leur balance des paiements. La balance des paiements mesure les transactions entre les acteurs économiques exerçant leur activité sur le territoire national et ceux exerçant leur activité à l’étranger.

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Ainsi, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le rôle du système monétaire est de maintenir une stabilité économique mondiale en maintenant un contexte favorable à l’essor du commerce international. De plus, il permet d’accorder des prêts à certains pays en difficulté dans un contexte de reconstruction d’après- guerre.

Le fonds monétaire agissait donc dans cette optique en se portant garant du bon fonctionnement du système monétaire de Bretton Woods. De ce fait, lorsque certains pays se retrouvaient dans l’incapacité de maintenir la valeur de leur monnaie dans une marge de 1%, ils pouvaient recourir à des dévaluations ou des réévaluations.

Cependant, à partir de 1957, les différentes inflations que connaissent les États-Unis laissent esquisser une réforme du FMI et une redéfinition de son rôle dans le contrôle du commerce international et le système de Bretton Woods. En effet, les difficultés rencontrées par les États-Unis entraînent une perte de confiance dans le dollar poursuivie jusqu’à la fin des années 60, obligeant le président américain à adopter une réforme monétaire.

Cette réforme du FMI s’accélère le 15 août 1971, lorsque le président américain Richard Nixon suspend la convertibilité du dollar en or, amorçant la fin du système de Bretton Woods. Le rôle premier du fonds international, qui consistait à garantir la stabilité des taux de change dans une marge de 1%, est alors entériné. Le choc pétrolier de 1973 déstabilise le système des taux de change fixes dès lors remplacé par le régime de changes flottants, s’établissant en fonction du marché et de ses forces. En effet, le 8 janvier 1976, les accords de Jamaïque sont signés par les membres du fonds monétaire, permettant le flottement des monnaies. Ces accords précipitent :

  • L’abandon de la définition des monnaies par rapport à l’or ;
  • L’acceptation des systèmes des changes flottants, rendant désormais les cours des monnaiestributaires de l’offre et de la demande ;
  • L’attribution du rôle de surveillance à l’institution financière et d’une place prépondérante aux droits de tirage spéciaux (DTS) qui constituent une monnaie artificielle créée par celui-ci, permettant à ses membres de compléter leurs réserves existantes.

Au lendemain des accords de Jamaïque, il est décidé que le fonds monétaire pourra accorder des crédits aux pays en voie de développement, sous réserve d’application de la politique monétaire du fonds international.

Ce nouveau rôle accordé au FMI est mis en application lors des années 80, à la suite de l’éclatement de la crise de la dette du tiers monde. Le fonds monétaire international impose alors ses politiques économiques et de lutte contre la pauvreté à de nombreux pays d’Afrique et d’Amérique Latine en échange de crédits accordés aux pays en difficulté.

Fort de son nouveau rôle de surveillance attribué lors des accords de Jamaïque, le FMI se porte garant du bon fonctionnement de l’économie mondiale en venant en aide aux pays en difficulté financière, tout en imposant une politique budgétaire aux pays créditaires de l’institution.
Cependant, la crise asiatique de 1997 souligne les limites de la gestion des politiques budgétaire et économique des pays en difficulté, par le FMI. Durant cette crise, qui toucha en premier lieu l’Indonésie, la politique d’austérité monétaire et de rigueur budgétaire imposée par l’institution a aggravé la crise, cristallisant les critiques sur la gestion de cette période de difficulté économique par l’institution. En outre, certains pays comme la Chine ont éludé cette crise en adoptant des politiques économiques et budgétaires à l’encontre des recommandations. En effet, les réformes préconisées reposaient sur une restructuration du secteur des banques en pratiquant des fusions et en fermant les établissements non viables. Les conséquences sociales du programme ont été très largement critiquées à tel point que même la Banque mondiale a fait des reproches à l’organisation financière concernant sa gestion de la crise.

Cependant, certains pays tels que la Corée du Sud ont pu résorber la crise en adoptant partiellement les mesures préconisées par l’institution.

Cette gestion hasardeuse de la crise asiatique par l’institution internationale a provoqué l’émoi et la grogne de certains pays de la région, témoins de la gestion difficile de la crise, conduisant alors le Japon à proposer, en 1997, la création d’un fonds monétaire asiatique.

 

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Les outils d’aide et de surveillance du FMI

Depuis les accords de Jamaïque, le rôle de l’institution réside essentiellement dans le soutien de pays en proie à des difficultés financières. De ce fait, lorsqu’un pays fait face à une crise financière de grande ampleur, ce-dernier se voit octroyer des prêts afin d’empêcher l’aggravation de la crise pouvant affecter et avoir des répercussions sur l’économie mondiale. Cependant, les prêts s’accompagnent d’une obligation de mise en application de politiques d’ajustement structurel afin de corriger les causes des difficultés économiques rencontrées. Le FMI se consacre donc à accorder des prêts aux pays en difficulté financière, conseiller les États membres sur leur politique économique et apporter une assistance technique aux États membres le nécessitant

De plus, une surveillance permanente de l’économie des pays membres est assurée en envoyant des inspecteurs sur place une fois par an afin d’évaluer, en concertation avec le gouvernement et la banque centrale du pays, la présence de risques pesant sur la stabilité intérieure et mondiale qui justifieraient d’ajuster les politiques économiques ou financières. Les analyses reposent notamment sur l’appréciation des politiques monétaires, budgétaires et financières qui font ensuite l’objet d’un rapport soumis au Conseil d’administration, dont l’opinion est par la suite transmise aux autorités nationales des pays concernés.

Le FMI suit également les tendances économiques mondiales et régionales et analyse les effets de débordement des politiques de ses États membres sur l’économie internationale. Il utilise différents instruments de surveillance comme ses publications régulières : Perspectives de l’économie mondiale qui dressent un bilan économique global et analysent les risques financiers à l’échelle mondiale., Rapport sur la stabilité financière dans le monde qui évalue l’évolution des marchés financiers mondiaux ainsi que les déséquilibres financiers susceptibles de déstabiliser l’économie mondiale et enfin Moniteur des finances publiques qui a pour objet la divulgation de projections budgétaires des pays en tenant compte de la politique sociale et économique de ces derniers, et permet également d’évaluer l’évolution de la situation des finances publiques des différents États.

Ces analyses visent donc à déterminer la pertinence des politiques menées par les pays membres. Cette surveillance économique est inscrite dans l’article IV des statuts du FMI, adoptés lors des accords de Jamaïque. En vertu de cet article, l’instance internationale se doit de contrôler le système monétaire mondial et la manière dont chaque pays membre remplit ses obligations.

Pour ce faire, l’organisation financière s’appuie sur des décisions votées par l’ensemble des 189 pays membres de l’institution internationale. La voix de chaque pays est pondérée en fonction de sa participation budgétaire à l’organisation. La gestion est régie par un conseil d’administration composé d’un président et de 24 administrateurs représentant chacun une nation. De même qu’à l’ONU, certains pays disposent d’un représentant permanent (les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France, le Japon, la Chine, la Russie et l’Arabie Saoudite). La plupart des décisions sont prises à l’unanimité, cependant les États-Unis et l’Union européenne disposent d’un droit de véto.

Dans cette optique de surveillance économique et d’aide aux pays en difficulté financière, le FMI est intervenu à maintes reprises dans les pays en développement dans les années 80 à la suite de la crise dite du tiers monde. L’instance internationale est aussi intervenue, au cours de son histoire, dans certains pays développés comme la Corée du Sud à la fin des années 90 et plus récemment avec la Grèce en 2010 et 2011, ou encore le Portugal, l’Ukraine, l’Irlande en 2012.

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Afin de résoudre les difficultés financières des pays auxquels le FMI accorde des prêts, ce dernier incite les gouvernements à suivre les recommandations politiques, économiques et sociales de l’institution. L’une des plus emblématiques est l’encouragement à la dérégulation du marché du travail. Cette politique est souvent mise en avant par l’institution internationale afin de soutenir la croissance économique. Ainsi, lors de la crise grecque en 2010, le pays sollicite l’aide du FMI et de l’Union Européenne. Après des négociations âpres entre les différentes parties, la Grèce obtient un prêt à hauteur de 110 milliards d’euros sur 3 ans, avec 80 milliards d’euros prêtés par les pays de la zone euro et 30 milliards par le FMI).

En contrepartie de ce prêt, le pays est soumis à une série de mesures étroitement surveillées par les pays de la zone euro et le FMI.
Ainsi, ces mesures imposent : La suppression des 13e et 14e mois dans la fonction publique compensée par une prime annuelle de 1000 euros pour les fonctionnaires gagnant moins de 3000 euros par mois, une augmentation de la durée des cotisations de retraite qui passe de 37 annuités à 40 annuités en 2015, une hausse de la TVA à 23%, la mise en place d’une taxe sur les résidences illégales.

Des limites avérées dans la gestion des crises financières

Certains détracteurs s’accordent à dire que le FMI est un instrument au service des pays les plus riches, qui le financeraient afin d’imposer leur politique économique et financière aux pays qui solliciteraient l’aide de l’organisation. En outre, le poste de directeur est généralement attribué à un européen, ce que fustigent certains dirigeants des pays en développement tel l’ancien président de la Commission de l’Union africaine Alpha Oumar Konaré. Cette pratique est également contestée par d’autres grands pays comme la Chine, la Russie et le Brésil, qui s’estiment lésés.

Le FMI fut vivement critiqué dans la gestion de certaines crises économiques comme la crise asiatique de 1997 ou plus récemment la crise de 2008. Selon ses détracteurs, l’institution n’aurait accordé que peu d’attention à la dégradation du bilan des secteurs financiers, aux liens éventuels entre politique monétaire et déséquilibres mondiaux, ainsi qu’à l’expansion du crédit. Ce grief fait à l’organisation est également appuyé par le président russe Vladimir Poutine qui appelle à une réforme du FMI afin d’être plus rapide dans la prise de décisions dans l’environnement très variable de la finance mondiale.

Ainsi, le Bureau indépendant d’évaluation du FMI (BIE) a émis un rapport concernant la gestion de la période 2004-2007 par l’institution financière. Le rapport émet de nombreuses réserves, en soulignant une bévue de doctrine de l’institution, présentant l’autorégulation des marchés comme suffisant pour écarter tout problème majeur des institutions financières.

 

Les critiques adressées au FMI proviennent majoritairement d’organisations altermondialistes et d’économistes réputés libéraux (tels que Milton Friedman) ou de la Banque mondiale. Selon eux, les interventions du FMI dans les pays en difficulté aggravent la pauvreté et les dettes en inhibant toute capacité d’intervention de ces Etats, alors contraints d’appliquer les réformes structurelles, économiques et budgétaires imposées par l’organisation mondiale. En effet, le grief incombé à l’organisation repose sur le fait que les politiques économiques et budgétaires imposées aux pays demandeurs d’aide sont sensiblement identiques et ne tiennent pas compte des différences structurelles et économiques de ces différents pays.

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Avec la crise du COVID-19, le FMI est revenu sur le devant de la scène afin de résorber la crise dans les pays les plus en difficulté. De ce fait, bien que l’institution soit victime de contestation et de critiques acerbes la fragilisant, la crise actuelle semble lui donner un second souffle lui permettant de consolider son influence dans la gestion et le contrôle de l’économie mondiale.

Ainsi, le FMI a mis en place différentes mesures dans l’optique de juguler la crise du COVID-19, avec notamment un allégement de la dette prononcé pour 27 pays, la création d’une ligne de liquidité à court terme afin de renforcer davantage la sécurité financière mondiale. En outre, une augmentation des ressources des programmes de prêt en vigueur a été décidée, afin de tenir compte des nouveaux besoins causés par la pandémie.

 

Salim Hadjene, étudiant à l’IMT Lille Douai et contributeur du blog AlumnEye