Prépa, HEC, Summer Internship puis Graduate chez Goldman Sachs, notre témoin du jour a un parcours quasi sans faute, très élitiste. Toutefois il a récemment pris un tournant dans sa carrière professionnelle en intégrant la direction financière d’une application qui permet à de jeunes rappeurs de percer. Quitter la banque d’affaires a été un choix audacieux et nécessaire pour notre témoin. Comment se déroulent un Summer et un Graduate chez GS ? Quelles sont les fautes à éviter en M&A ? Quels débouchés après une carrière en banque d’affaires ? Dans cette interview, il vous livre les réponses à toutes ces questions.

Bonjour, tout d’abord, peux-tu nous décrire ton parcours ?

Mon parcours est assez classique pour de la banque d’affaires : j’ai fait un bac S puis une prépa avant d’intégrer HEC Paris. Pendant mes années à HEC je me suis spécialisé en Corporate Finance et j’ai eu l’occasion de faire 3 stages : 6 mois dans une banque Suisse à Paris dans l’équipe M&A généraliste, 6 mois au bureau de Paris d’un fonds de Private Equity américain et un Summer chez Goldman Sachs. Mon Summer s’étant très bien déroulé, Goldman Sachs m’a proposé un Graduate donc je suis parti travailler pour leur équipe M&A Consumer, Retail and Healthcare à Londres. Après 1 an et demi chez GS, j’ai décidé de quitter le monde de la banque d’aiffaires. J’ai alors profité d’avoir du temps libre pour partir à l’étranger et ai récemment rejoint une application qui propose un mini-studio d’enregistrement à des rappeurs souhaitant se faire connaître. Je suis dorénavant responsable de la gestion financière et administrative quotidienne de cette entreprise, principalement en lien avec une levée de fonds à venir.

Peux-tu nous raconter un peu comment se déroulent un Summer et un Graduate chez Goldman ?

Mon Summer chez Goldman s’est déroulé en deux temps. J’ai d’abord passé 1 semaine à Londres avec tous les autres Summer interns durant laquelle j’ai principalement été formé à la comptabilité et à la valorisation financière. On m’a également sensibilisé à l’importance de la communication et de la gestion du temps dans un environnement où la clientèle est très exigeante. Pour un stagiaire Français, généralement déjà au point techniquement, cette semaine est surtout une excellente occasion de créer du lien au sein de la promotion de Summer interns. Dans un second temps, j’ai travaillé avec l’équipe parisienne de Goldman sur un mandat de vente dans le secteur de l’hôtellerie. Travailler sous la supervision directe d’un Associate (6 ans d’expérience) a été particulièrement formateur. Je travaillais sur la construction du modèle qui servait de base au Business Plan présenté aux acheteurs potentiels, sur la rédaction de l’IM (document marketing présentant l’actif) et sur tout le volet « gestion de projet » en lien avec les avocats et les banques en co-mandat avec GS.  En fait, je dois avouer que je me suis senti bien plus exposé en Summer à Paris qu’en tant qu’Analyste à Londres.

Deux semaines après la fin de mon Summer, Goldman m’a fait une proposition de Graduate à Londres, comme j’en avais fait la demande. Avec le recul, Paris aurait sans doute été un meilleur choix : même si Londres est la plateforme européenne de GS où la plupart des clients se trouvent, l’exécution des deals se fait davantage au niveau local. Avec l’équipe de Londres, je faisais beaucoup d’origination, travail généralement moins valorisant pour un junior.

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Certains disent que dans les américaines, l’ambiance est très (trop) policée, au point de rendre fous certains français. T’en penses quoi ?

 Je suis d’accord pour dire que l’ambiance est plus policée dans les banques américaines. Dans le cas de Goldman Sachs, je dirai que l’ambiance est plus policée d’avantage par souci de respect d’autrui que par snobisme. J’ai adoré travailler là-bas car je me sentais impliqué dans les deals et considéré à ma juste valeur contrairement à des expériences précédentes en banque d’affaires durant lesquelles j’ai eu le sentiment d’être seulement utilisé comme une ressource pour le travail de petite main. En effet, quand tu es stagiaire, tu peux tomber sur des banques qui ne cherchent pas à te former et à te prendre comme un membre à part entière de l’équipe.

Selon toi, quelles sont les qualités requises pour faire du M&A ? et le défaut rédhibitoire ?

Pour moi, les qualités requises en M&A sont la motivation, l’autonomie, l’envie d’apprendre et surtout le fait d’être pro-actif dans son apprentissage. Il faut également avoir une capacité de travail importante et savoir ravaler son égo (i.e. ne pas être trop sensible à la critique). Et surtout, il faut absolument éviter d’être trop grande gueule.

Tu travailles maintenant pour une application permettant à de jeunes rappeurs de se lancer. Peux-tu nous raconter comment tu en es arrivé à travailler dans cet univers ?

Ce n’est pas ma passion pour le rap mais le créateur de l’appli qui m’a convaincu de rejoindre l’équipe. C’est un visionnaire et je vois beaucoup de potentiel dans le business. Mon expérience en banque d’affaires les intéressait et je me suis bien entendu avec l’équipe, c’est donc naturellement que j’ai saisi l’opportunité de travailler avec eux.

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Quel est ton job au quotidien ?

Je m’occupe de toute la partie finance administrative, et en particulier du projet de levée de fonds.

Si tu devais nous donner le nom d’un ou deux rappeurs inconnus du grand public mais qui mériteraient de l’être ?

Axiom, un ancien rappeur et producteur venant de Lille. Il est très engagé politiquement donc il a une vision assez intéressante du monde de la musique et il souhaite vraiment aider de jeunes talents à percer. Il a également fait beaucoup pour les jeunes des quartiers.

Tu as eu un parcours très classique et élitiste avec du M&A, du PE, etc. Et te voilà dans l’industrie du rap, où les gens ont parfois des préjugés. Ça n’a pas surpris tes proches ?

Cette décision n’a pas du tout surpris mes proches car j’avais vraiment besoin de changer d’air et de découvrir de nouveaux horizons. Travailler dans un tel environnement après avoir été en banque d’affaires où tout le monde vient du même milieu représente un réel changement qui pousse à l’ouverture d’esprit. Je découvre des manières de travailler différentes des miennes et c’est très enrichissant car j’apprends énormément de ces personnes-là.

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Certains Analysts en M&A se plaignent que leur boss partent parfois en « freestyle ». Es-tu d’accord avec cela ?

Pas du tout, je dirais même que c’est le contraire. En M&A, les gens ont très peur de produire le moindre élément de jugement qui ne puisse être soutenu par une analyse numérique ou la voix d’un expert. Aucune place n’est laissée à l’improvisation.

Qu’est-ce que tu gardes de ton passé de banquier d’affaires dans ta vie actuelle ?

Je n’ai aucun regret sur mon passage en finance de haut de bilan qui a été particulièrement formateur. Lorsque je travaillais en fonds, j’ai appris à regarder une entreprise sous tous les angles et à réfléchir à un marché en profondeur. J’ai ensuite pu développer plus avant cette compréhension chez Goldman. J’ai non seulement acquis de la rigueur et de l’efficacité, mais surtout, j’ai appris à hiérarchiser les priorités dans un environnement exigeant et amélioré ma compréhension de la façon dont on présente de l’information devant des personnes occupant un haut niveau de responsabilité. La banque d’affaires m’a apporté des compétences techniques et m’a appris à communiquer de façon plus efficace.

Beaucoup de nos lecteurs souhaitent se diriger vers une carrière en banque d’affaires. Quel message tu pourrais leur faire passer, et que tu aurais aimé entendre quand tu étais étudiant ?

Si je devais donner un conseil à mon jeune moi ce serait d’élargir ses horizons et de découvrir d’autres métiers/entreprises avant de se lancer dans la banque d’affaires juste parce que ça brille. J’aurais, par exemple, aimé découvrir des métiers où l’on travaille davantage de façon transversale plutôt qu’en silos hiérarchiques.

Ariane Guillaume, étudiante à l’EDHEC Business School et Responsable Editorial du blog AlumnEye