Après 5 années passées chez Barber Hauler en M&A, Hadrien Gerbal a décidé de se tourner vers l’entreprenariat en cofondant Appie, une marque de cidre qui s’est récemment élargie aux limonades.

Hadrien nous explique dans cette interview ses débuts chez Barber Hauler à la création de la boutique, et nous donne de précieux conseils pour intégrer le M&A puis réussir sa reconversion.

 

Peux-tu nous parler de ton parcours ? Pourquoi avoir choisi de t’orienter vers le M&A ?

J’ai beaucoup hésité entre différentes voies et ai finalement choisi d’intégrer Dauphine en post-bac. La spécificité de mon parcours est que je suis allé assez vite : je n’ai pas fait de césure et n’ai pas d’expérience à l’étranger. En quatrième année, je me suis dirigé vers la finance. J’avais auparavant réalisé un stage d’été chez un broker en finance de marché. L’ambiance ne m’avait pas particulièrement emballée alors pour mon Master 2 je me suis orienté vers la finance d’entreprise. Le master vraiment sympa en finance d’entreprise à Dauphine est le 225, auquel j’ai donc candidaté. Pour être tout à fait transparent, je ne savais pas trop ce que je voulais faire au départ. Dans le master 225, il y avait une émulation pour le M&A : près de 80 à 90% de la promotion se dirigeait vers ce domaine. A l’origine, ce n’était donc pas un choix murement réfléchi mais cela me disait bien d’essayer en stage de fin d’études.

 

Tu n’as pas fait d’année de césure alors qu’aujourd’hui elle est devenue quasi obligatoire dans toutes les écoles. Cela a été difficile de trouver ton premier job ?

C’est lorsque j’ai commencé à chercher un stage de fin d’études en M&A que la spécificité de mon parcours – particulièrement le fait de n’avoir pas fait de césure – m’a posé problème. Mes camarades du 225 avaient tous un an d’expérience en stage. J’ai finalement eu une offre dans une boutique M&A qui était en train de se créer : Barber Hauler. Le stage de fin d’études m’a beaucoup plus ; j’y suis donc resté 5 ans.

 

Selon toi, qu’est-ce qui est le plus difficile quand on commence un job en M&A sans quasiment aucune expérience ?

Le plus dur a été de trouver ! A l’époque, la césure n’était pas aussi démocratisée qu’aujourd’hui. Il y avait encore quelques étudiants qui n’en faisaient pas. A la fin de mon master 1 j’ai postulé au 225 et ai été accepté ; je ne voulais donc pas y renoncer pour faire une césure. Objectivement, on part avec pas mal de retard lorsque l’on cherche un stage de fin d’études sans avoir effectué d’année de césure au préalable. Le stage de fin d’études est un stage de pré-embauche – c’est ce que l’on espère en tout cas. Je me suis retrouvé face à des étudiants qui avaient fait deux fois 6 mois de stage, en enchaînant entre une banque puis potentiellement un stage un peu différent afin d’acquérir une double compétence (Private Equity, Transaction Services, etc.). Cela a donc été plus compliqué pour moi. Comme on postulait tous aux mêmes offres, si l’entreprise recevait 10 CV du 225 et qu’il fallait réaliser un premier tri, mon CV était éliminé parmi les premiers.

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5 ans passés chez Barber Hauler ; peux-tu nous parler de cette expérience ?

Cela a été une super expérience ! J’ai beaucoup aimé mes années chez Barber Hauler pour plusieurs raisons. Premièrement, c’est que j’ai le sentiment d’avoir eu une exposition assez importante. J’étais souvent présent dans les rendez-vous, que ça soit lors de l’origination ou des exécutions. C’est le charme de la boutique ! Je ne peux pas bien comparer car je n’ai pas travaillé ailleurs en M&A, mais j’ai eu de nombreux retours de connaissances travaillant dans d’autres banques. Ensuite, ce qui était aussi sympa c’est qu’à mon arrivée j’étais le premier stagiaire de la boutique car elle venait de se monter très récemment. J’ai donc aussi un peu participé à la construction du projet.

 

Quel est le positionnement de cette boutique parisienne ?

La particularité de Barber Hauler est son positionnement « grands comptes » et plutôt large cap, du fait de l’expérience passée des associés. Il y avait à la fois une forte exposition et le côté assez excitant de travailler sur des deals de taille significative Le revers de la médaille est que plus les deals sont gros, moins il y en a. Dans mes 2 premières années, le nombre de deals closés auxquels j’ai participé était assez limité.

 

Tu étais un des premiers salariés au tout début de l’aventure Barber Hauler. Comment cela se passe-t-il lorsqu’on est une équipe resserrée ?

Là encore, c’est difficile de comparer car je n’ai pas connu de structure classique. D’après ce que j’ai vécu, je pense que la grosse différence quand j’étais Analyste puis Associate est que je travaillais très souvent en direct avec les deux fondateurs : Dominique Bazy et Pascal Hervé. Dominique Bazy était auparavant Directeur Général d’UBS en France et Vice-Chairman Europe. Quand tu es analyste et que tu travailles avec ces personnes, il y a un peu plus de stress et de pression. J’ai également eu une formation un peu moins classique qu’en banque je pense. J’ai le souvenir d’amis dans d’autres boutiques/banques qui ne faisaient que des comparables pendant plusieurs mois, ce n’est pas forcément hyper emballant mais au moins à la fin tu maîtrises le sujet parfaitement ! Il y a moins ce côté en boutique je pense. Par contre, le côté très agréable était l’exposition que j’ai pu avoir avec ces personnes. Cela est très valorisant et intéressant afin de comprendre pourquoi on fait les choses. Un autre avantage, qui est relativement vrai dans toutes les boutiques, est que plus la structure est petite et peu pyramidale (avec de nombreux échelons), plus les informations descendent vite. D’un point de vue optimisation du temps, je pense que c’est plus agréable de se dire que la journée commence dès le matin et que le staffing ne tombe pas à 18h quand les rendez-vous de la journée sont finis et qu’il faut réfléchir à ce qu’il faut faire pour le lendemain.

 

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Il y a 5 ans, tu as co-fondé Appie, une marque de cidre. Comment est venue cette idée ? As-tu toujours souhaité devenir entrepreneur ?

Cela faisait quelques temps que je réfléchissais à un projet entrepreneurial. Je me posais la question de ce que je souhaitais faire après le M&A, comme beaucoup de gens je pense. J’ai des parents entrepreneurs et j’ai toujours baigné là-dedans. C’était quelque chose qui m’attirait et j’ai toujours eu ce projet de creuser quelques idées. On est 5 associés chez Appie, ce qui est assez original. En discutant avec ces amis, on s’est demandé ce que l’on pouvait faire et un jour on est tombé sur le cidre. On s’est dit que c’était un super projet et qu’il y avait énormément de choses à changer autour de ce produit que tout le monde connaît mais qui est au final assez rarement consommé ! Comme j’étais relativement ouvert d’esprit et partant pour faire le saut, il a suffi que le projet soit assez emballant et que j’y crois pour me dire « je saute le pas et je démissionne ».

 

Vous êtes 5 associés dont 3 qui ont travaillé en M&A / Private Equity. En quoi vos expériences vous aident-elles au quotidien ?

C’est une bonne question. La vérité est que je ne sais pas vraiment si ce sont nos formations et nos activités passées qui nous ont tant apportées dans Appie. Je me rends compte que ce qui fait que l’on avance bien aujourd’hui, ce sont nos caractères. En l’occurrence, on a tous des caractères assez différents : certains sont fonceurs, certains plus réfléchis, d’autres plus créatifs. Je pense que ce qui nous fait avancer le plus vite aujourd’hui ce sont plus nos personnalités que nos formations. Néanmoins, je pense qu’une formation financière permet quand même d’avoir la réalité des chiffres lorsque l’on souhaite monter son entreprise. Nous sommes dans de nombreux réseaux d’entrepreneurs et j’ai pu échanger avec d’autres entrepreneurs lançant leur entreprise. Certains sont assez loin des chiffres et je pense que c’est plus compliqué pour eux. Il y a certains sujets qui sont clés au quotidien chez nous (par exemple le BFR, le financement, etc.) et que nous maîtrisons. Je pense que c’est un véritable atout lorsque l’on monte son entreprise.

 

Quels sont vos projets ?

De manière générale nous sommes assez discrets sur la communication corporate. Par exemple nous avons déjà fait une levée de fonds sur laquelle nous n’avons pas communiqué. Quand tu montes une startup tech, la levée de fonds est un peu un critère de succès. Selon moi, les entreprises qui sont dans le domaine de la tech ont intérêt à communiquer là-dessus, car c’est comme ça qu’elles font parler d’elles et attirent les investisseurs, clients et talents. Nous avons quant à nous un business assez classique : on vend notre produit (une bouteille) à des bars que l’on va démarcher quasiment un à un. Cela n’a pas d’intérêt pour nos partenaires et clients de savoir ça. Mais cela dit, nous avons encore de nombreux projets de développement à venir. Notre projet s’est construit sur le cidre, et s’est récemment élargi avec des limonades aux fruits 100% bio car nous avions une forte demande de nos clients pour des produits sans alcool de qualité. Nous ne sommes donc qu’au début de l’histoire.

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Prenez-vous des stagiaires ? Pour quelles missions ?

Historiquement, on a toujours pris quelques stagiaires de manière régulière sur des fonctions diverses. Une grosse part de notre activité est la partie commerciale ; on recrute donc souvent pour ce poste, de manière sédentaire au bureau pour démarcher des grands comptes ou même sur le terrain. C’est un type de profil un peu spécifique. On a également toujours eu des stagiaires « couteau suisse » / bras droit, qui touchent un peu à tous les sujets. De manière générale, j’ai l’impression que l’expérience start-up intéresse de plus en plus d’étudiants pour mettre une expérience un peu différente sur leur CV. Et on a donc parfois des profils très intéressants pour nous aider qui postulent. D’ailleurs j’ai eu récemment plusieurs contacts dans le cadre de prise de références concernant une de nos premières stagiaires qui postule pour un job en finance. Cela montre que son expérience chez Appie est également valorisée comme ses autres stages. Il me semble qu’il est intéressant pour un stagiaire de passer 6 mois dans une grosse entreprise en corporate finance ou en market, puis 6 mois un peu plus exposé « les mains dans le cambouis » dans une startup. Cela intéresse de plus en plus les étudiants et à mon sens à raison car ce sont deux expériences tout à fait complémentaires. Quand on peut faire une césure d’un an, ce n’est pas obligatoire de faire deux fois de la finance, une fois en M&A et une fois en Transactions Services. On apprendra plus à faire l’un ou l’autre, et les autres 6 mois quelque chose de tout à fait différent, dans une startup par exemple.

Concernant les missions d’un stagiaire « bras droit » chez Appie, il n’y a pas vraiment de missions types. Il s’agit plutôt d’être capable d’aider sur tous les sujets auxquels on peut être confronté. Cela peut concerner des sujets organisationnels ou administratifs, car créer une entreprise c’est aussi faire face à toutes ces choses un peu nouvelles mais indispensables à la gestion au quotidien. Cela peut aussi être la mise en place de reportings ou l’aide au démarchage commercial. Par exemple, je m’occupe personnellement de la gestion des grands comptes, de l’export et de la partie administrative et financière. Un stagiaire peut donc être amené à m’assister sur ces différents sujets en allant directement démarcher des prospects grands comptes, identifier des partenaires potentiels ou des distributeurs à l’international, et participer à l’élaboration du reporting mensuel. On recrute régulièrement (sur des durées de 6 mois). Nous sommes preneurs de candidatures de personnes qui ont envie d’apporter leur pierre à l’édifice. Nous avons d’ailleurs nos offres de stage sur le site Welcome to the Jungle, mais il y a aussi la possibilité de postuler en candidat libre. Il ne faut pas hésiter à le faire d’ailleurs ! Parfois ce sont les profils qui créent les postes. L’agilité est le charme des startups !

 

Quels conseils aurais-tu aimé obtenir lorsque tu étais jeune professionnel ?

Je vais parler de que ce que je connais ! Pour avoir vu autour de moi pas mal de personnes qui n’osaient pas se lancer, je pense qu’il ne faut pas hésiter à consacrer le temps nécessaire au projet pour se rendre compte s’il peut valoir le coup. Ensuite, il ne faut surtout pas hésiter à sauter le pas. C’est exactement ce que je m’étais dit à l’époque ! L’avantage d’être allé assez vite dans mon parcours est que lorsque je suis parti de chez Barber Hauler j’avais 5 ans d’expérience professionnelle mais j’avais seulement 26-27 ans. A cet âge-là c’est quand même assez facile de retomber sur ses pattes si jamais Appie n’avait pas marché. On peut faire valoir ce projet sur le CV, même s’il n’a pas fonctionné. Ce n’est pas une mauvaise ligne, au contraire c’est valorisable ! Si on a un projet qui semble pertinent et que l’on a envie de le mener à terme, il ne faut pas hésiter à se lancer.

 

Camille Hutt, étudiante à Grenoble Ecole de Management et Responsable Editoriale du blog AlumnEye