Le métier de Broker reste, de nos jours, méconnu du grand public, malgré sa très large mise en valeur cinématographique dans des films comme le Loup de Wall Street ou Boiler Room. L’imaginaire collectif connote péjorativement ce métier, au détriment de sa complexité. Par définition, le Broker est un intermédiaire qui exécute des transactions sur les marchés pour le compte de ses clients. Il peut s’agir de firmes dont c’est l’activité principale – comme Charles Schwab ou Ameritrade aux Etats Unis – ou bien d’une business unit parmi d’autres, tels Merrill Edge chez Merrill Lynch, ou Barclays Stockbroking. Focus sur un univers souvent caricaturé et en perpétuelle évolution.

 

Qu’est-ce qu’un Broker ?

Le Broker réalise des opérations pour compte de tiers, qu’il s’agisse d’entreprises ou de particuliers. Le métier possède donc deux facettes complémentaires : commerciale (s’agissant de la vente d’un service) et financière (plus technique). Par rapport au Sales, le Broker est un apporteur externe, il fait le lien entre des clients et des traders d’une banque. Il doit négocier aussi bien avec le trader qu’avec le client pour assurer sa rémunération. Il se doit également d’être plus pointu en expertise économique, sachant qu’il n’a généralement pas de fonction Research pour le seconder. Cependant les deux fonctions partagent le même rôle hybride financier/commercial et le courtage est généralement une bonne porte d’entrée vers le métier de sales.

On distingue deux catégories de Brokers : le conventional offrant un service complet à ses clients, incluant analyse et gestion de portefeuille, et le discount qui se contente plus ou moins d’exécuter les ordres en pratiquant des prix faibles. Il est facile – et généralement admis –  de simplifier les relations entre investisseurs et Brokers. Animé par l’appât du gain, le Broker pousserait le client à spéculer. Il est donc important de comprendre le métier pour ne pas oublier que le Broker est un acteur souple chargé de trouver l’équilibre entre des logiques opposées.

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La tension entre appât du gain et satisfaction client

La nature des produits vendus par le Broker est complexe. Il doit donc comprendre les mécanismes de marché à très haut niveau afin de pouvoir donner des conseils pertinents à ses clients et justifier ses commissions. Ainsi, il doit passer des tests de compétences pour pouvoir exercer son métier – les Series 7 et 63 aux Etats-unis – ou être certifié par l’AMF en France. Ces tests visent à certifier une connaissance des produits et une sensibilité à l’éthique, nécessaires à l’exercice de la profession.  Si sur ce plan, le Broker s’apparente à un opérateur classique de marché, sa méthode de rétribution l’incite à encourager la spéculation. Chaque ordre lui rapporte une commission proportionnelle à la sophistication du produit et à la taille de la position engagée. Dans la mesure où il n’est pas directement responsable des pertes, il fait finalement prendre des risques au client qu’il n’assumera pas lui-même.

Ainsi, le Broker s’éloigne de l’opérateur de marché standard. L’intérêt qui l’anime – détourné de la qualité de l’investissement réalisé – le rapproche des fonctions commerciales. Nombre de litiges tournent donc autour de la bonne foi de cet intermédiaire lorsqu’il a « vendu » à son client. En théorie, l’accès instantané à l’information permis par les nouvelles technologies rend la réputation d’un Broker extrêmement fragile et devrait le dissuader de vendre aveuglément des produits financiers. Autrement dit, selon la formule de Bentham : « the more strictly we are watched, the better we behave ». Par ailleurs les clients du Broker sont généralement des investisseurs avertis et il semble raisonnable de penser qu’ils consacrent du temps à leurs finances, ce qui les préserve des investissements irrationnels. En pratique, le sort médiatisé d’un très gros Broker FX aux Etats-Unis montre combien sont grandes les opportunités de dérive dans des systèmes complexes.

 

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Le défi de la désintermédiation électronique

Les Brokers traditionnels sont exposés à un nouveau risque de désintermédiation. Nombre de Brokers discount en ligne se contentent d’exécuter les ordres des clients. A titre d’exemple, Charles Schwab – Broker d’envergure outre-Atlantique – a été contraint de diviser ses frais de courtage par trois en une vingtaine d’années, sous la pression des plates-formes de trading. Face la concurrence sur les prix, les Brokers traditionnels ont pris le parti d’une montée en gamme de leurs services. Ils mènent ainsi une concurrence hors prix, reposant sur la qualité de leurs analyses. Tous les Brokers rendent aujourd’hui leur recherche accessible aux clients, et font du service l’essentiel de leur valeur ajoutée. Afin de faire la publicité de leur expertise, de plus en plus de Brokers mettent à la disposition de tous une partie de leurs analyses et de leurs conseils d’investissement. Charles Schwab publie, par exemple, ses « white papers » en libre accès sur son site.

La décision de recentrer la valeur du service sur le conseil d’investissement est extrêmement pertinente. Des études comportementales ont par exemple montré que les investisseurs individuels employant des plates-formes en ligne réalisent 50% de transactions de plus que les individus offline. Ces derniers voient leur propension à spéculer augmenter, alors que leurs ordres souffrent d’un timing moins efficace. Dès lors, pourquoi préférer au Broker en ligne un Broker traditionnel ? Pour pouvoir co-construire sa stratégie avec un spécialiste, et placer un intermédiaire entre sa propre impulsivité et le marché.

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Stratégie de candidature

Si cet article a éveillé votre intérêt pour le métier de Broker, sachez qu’en France plusieurs firmes recrutent pour des stages.  Parmi les plus connues on trouve Kepler Cheuvreux, OTCex, mais il est également possible de candidater chez des Brokers spécialisés sur un marché comme FXCM. Le métier est assez similaire à celui de Sales en banque, et peut donc constituer une bonne porte d’entrée vers cette fonction. La complexité de ce poste tenant avant tout à sa nature hybride, il convient de bien se renseigner sur les différents prérequis de la fonction avant de postuler car une simple connaissance technique ne suffira vraisemblablement pas à faire de vous un bon candidat.

 

Les Brokers doivent faire face à plusieurs défis : il leur faut surmonter les divergences d’intérêts d’une part, et la concurrence de Brokers online bas-de-gamme d’autre part. Le nouveau positionnement vers le service réaligne leurs intérêts sur ceux des clients et préserve les Brokers de la concurrence prix. Néanmoins cela les rend toujours plus sensibles aux questions d’image, tout en réduisant leurs marges. Le futur des Brokers traditionnels passe donc par ces nouveaux impératifs de savoir-faire et d’e-réputation, autant d’axes de réflexion pour imaginer l’avenir du métier. Challenge technique, humain mais aussi éthique, le métier de Broker est à la fois complexe et stimulant; aussi, n’hésitez pas à orienter vos recherches vers ce type de poste.

 

Pierre-Jean COLIN, étudiant à Audencia et contributeur du blog AlumnEye